Le greenwashing est devenu un terme qui résonne de plus en plus dans notre actualité. Il y a quelques années nous découvrions ce que voulait dire ce terme anglosaxon qui était placardé sur tous les entêtes d’articles avec l’arrivée d’un “scandale” dans le monde automobile. En 2015, plusieurs constructeurs ont été accusés d’avoir triché sur les émissions de gaz d’échappement de leurs véhicules diesel pour les faire apparaître plus respectueux de l’environnement qu’ils ne l’étaient réellement. 

D’année en année, de nouveaux faits étaient mis en lumière. En 2018, H&M a été critiqué pour avoir mis en avant une collection de vêtements « éco-responsable » tout en continuant à produire massivement des vêtements à bas coûts dans des pays où les conditions de travail sont précaires. 
 
Quel rapport avec le monde de l’assurance ? Les exemples montrent des faits de greenwashing touchant à des biens matériels ; les voitures, les vêtements mais l’assurance peut-elle être concernée par ce type de pratique ?  

Qu’est ce que le greenwashing ?  

Le greenwashing ou écoblanchiment est une pratique marketing trompeuse qui consiste à présenter de manière exagérée ou mensongère les produits, services ou pratiques d’une entreprise comme étant respectueux de l’environnement. L’objectif est de donner une image positive de l’entreprise aux consommateurs en leur faisant croire qu’elle agit de manière responsable et durable. 

Le greenwashing peut se manifester dans le monde de l’assurance de plusieurs manières, notamment : 

  • En faisant la promotion de produits d’assurance qui prétendent être respectueux de l’environnement, mais qui ne sont pas soutenus par des pratiques réelles. Par exemple, une compagnie d’assurance peut proposer une assurance auto « écologique » pour les véhicules hybrides, mais ne pas offrir de réductions pour les voitures électriques ou les transports en commun. 
  • En mettant en avant des initiatives environnementales mineures pour donner l’impression que l’entreprise agit de manière responsable. Par exemple, une compagnie d’assurance peut mettre en avant sa participation à un programme de recyclage des papiers mais limiter que très peu ses investissements dans les énergies fossiles. 
  • En utilisant des termes vagues et non réglementés pour décrire les produits d’assurance. Par exemple, une compagnie d’assurance peut prétendre que ses produits sont « verts » ou « durables » sans fournir de définitions claires ou de normes concrètes. 
  • En ne divulguant pas l’impact environnemental réel de l’entreprise. Par exemple, une compagnie d’assurance peut se vanter de ses investissements dans les énergies renouvelables, mais ne pas divulguer l’ampleur de ses investissements dans les énergies fossiles ou l’exploitation de sables bitumineux.  

A la lumière de cette définition et de ces exemples, le monde de l’assurance lui aussi n’a pas été épargné par le greenwashing ces dernières années : 

  • AXA : en 2019, AXA a été accusée de greenwashing pour avoir annoncé qu’elle se retirait de l’industrie du charbon, alors qu’en réalité, elle avait simplement cessé de fournir une couverture d’assurance à certaines entreprises liées au charbon. 
  • Allianz : en 2020, Allianz a été critiqué pour avoir investi dans des entreprises qui ont été accusées de déforestation et de violation des droits de l’homme, ce qui a été considéré comme incompatible avec ses engagements en matière de développement durable. 
  • Generali : en 2021, Generali a été critiqué pour avoir déclaré qu’elle ne fournirait plus de couverture d’assurance pour les mines de charbon, mais en réalité, elle continuait à fournir des polices d’assurance aux entreprises impliquées dans l’extraction du charbon. 

L’Autorité des marchés financiers (AMF) en France, le régulateur britannique des assurances, la Financial Conduct Authority (FCA) ou encore la SEC (Securities and Exchange Commission) (Securities and Exchange Commission) aux Etats-Unis se saisissent de plus en plus de ces sujets et commencent à être plus stricts en matière de greenwashing, mais il reste encore beaucoup à faire pour empêcher les entreprises de faire de fausses allégations environnementales.  

Les consommateurs doivent également être conscients de ces pratiques et doivent rechercher des preuves solides pour étayer les allégations environnementales des entreprises avant de prendre des décisions d’achat ou d’investissement. 

Et la protection du consommateur ? 

De nombreuses réglementations ont été mises en place pour protéger les consommateurs contre le greenwashing. Par exemple, en Europe, le règlement sur les allégations environnementales a été adopté pour encadrer les pratiques de marketing écologique. 

Les entreprises peuvent également opter pour des certifications environnementales comme le label Ecolabel européen, le label AB pour l’agriculture biologique ou encore le label Fairtrade sont des outils pour aider les consommateurs à identifier les produits et services écologiques ou éthiques. 

Les entreprises ne sont pas seules, les organisations tierces indépendantes peuvent aider les entreprises à évaluer et à améliorer leur impact environnemental, notamment par l’intermédiaire des bilans carbones. 

Du côté de la protection des consommateurs, il est possible de mettre en avant la transparence des entreprises sur leurs pratiques environnementales et fournir des preuves vérifiables pour soutenir leurs allégations écologiques. Cela peut être fait en publiant des rapports de développement durable ou en fournissant des informations sur les certifications obtenues. 

Le dernier volet reste la sensibilisation des consommateurs, ils peuvent également jouer un rôle important dans la lutte contre le greenwashing en étant conscients des pratiques trompeuses et en examinant de près les preuves derrière les allégations écologiques. 

La lutte contre le greenwashing implique donc une combinaison de réglementation, de certifications environnementales, d’organisations tierces indépendantes, de transparence et de sensibilisation des consommateurs. 

Une prise de conscience dans le milieu de l’assurance, oui mais… 

De nombreuses compagnies d’assurance ont augmenté leurs investissements dans des énergies renouvelables, telles que l’énergie éolienne et solaire, afin de réduire leur empreinte carbone et d’aider à la transition énergétique. 

Certaines compagnies d’assurance ont développé des produits d’assurance spécialement conçus pour les entreprises et les particuliers engagés dans des pratiques durables, tels que les bâtiments à haute performance énergétique, les véhicules électriques et les projets de conservation de la nature. 

D’autres compagnies d’assurance ont adopté des politiques de transparence sur leurs investissements pour informer les clients et les parties prenantes sur les entreprises dans lesquelles ils investissent et leur impact environnemental. 

Enfin de nombreuses compagnies d’assurance ont pris des mesures pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, telles que l’adoption d’une politique de zéro émission nette d’ici 2050 et se sont engagées dans des initiatives environnementales, telles que la Task Force on Climate-related Financial Disclosures (TCFD), pour aider à lutter contre le changement climatique et promouvoir la durabilité. 

En France l’AMF (autorité des marchés financiers) et l’ACPR (Autorité de contrôle prudentiel et de résolution) ont pris la mesure des enjeux environnements. Ainsi l’ACPR vient de publier de nouvelles recommandations en la matière ciblant la publicité du produit phare de l’assurance : l’assurance vie. 

Le régulateur veut encadrer plus étroitement la manière dont les assureurs vie communiquent sur le caractère vert des produits qu’ils proposent. Cette recommandation complète celle du 19 décembre 2019 en matière de communications à caractère publicitaire des contrats d’assurance vie. 

A cette fin, l’ACPR cible trois types de publicités qui sont susceptibles d’induire le client en erreur : 

  • Celles faisant la promotion des caractéristiques extra financières d’un contrat d’assurance vie (ou de capitalisation) ou des supports qu’il propose 
  • Celles mettant en avant les caractéristiques extra financières de l’assurance vie ou de la capitalisation sans référence à un contrat précis 
  • Celles promouvant l’engagement ou la portée des actions menées par les personnes concernées sur les facteurs de durabilité au sens de l’article 2 point 24 du règlement SFDR (Sustainability Financial Disclosure Regulation). 

Dans sa recommandation, le régulateur invite les assureurs vie à vérifier que les arguments utilisés dans leurs publicités pour promouvoir le caractère vert d’un produit « reposent sur des éléments objectifs et précis ».  

Effective au plus tard le 1er avril 2023 « pour toute communication publicitaire diffusée à partir de cette date », cette recommandation s’applique à tous les supports de diffusion. 

Le tableau n’est pas tout noir et des actions pour l’environnement ont également été lancées ces dernières années :  

  • Axa : En 2020, Axa a annoncé qu’elle allait doubler ses investissements dans les énergies renouvelables pour atteindre 24 milliards d’euros d’ici 2025. Axa a également créé un fonds de 500 millions d’euros pour aider les entreprises à se développer de manière durable. 
  • Allianz : En 2019, Allianz a annoncé qu’elle cesserait d’investir dans le charbon et qu’elle visait la neutralité carbone dans ses activités d’assurance d’ici 2050. Allianz a également créé un fonds de 1,5 milliard d’euros pour les énergies renouvelables. 
  • Generali : En 2020, Generali a annoncé qu’elle investirait 3,5 milliards d’euros dans les énergies renouvelables d’ici 2025 et qu’elle visait la neutralité carbone dans ses opérations d’assurance d’ici 2050. Generali a également lancé une campagne de sensibilisation pour encourager les clients à adopter des pratiques durables. 

Les compagnies d’assurance ont également pris diverses initiatives en faveur de l’environnement en : 

  • Investissant de plus en plus dans des projets durables tels que les énergies renouvelables, les bâtiments durables, les transports propres, etc. Elles peuvent investir directement ou indirectement dans ces projets via des fonds d’investissement. 
  • Proposant de plus en plus de produits d’assurance durables tels que l’assurance pour les énergies renouvelables, l’assurance pour les bâtiments durables, l’assurance pour les véhicules électriques, etc. 
  • Réduisant leur propre empreinte carbone en réduisant leur consommation d’énergie, en utilisant des sources d’énergie renouvelable, en favorisant le travail à distance, etc. 
  • Publiant de plus en plus de rapports environnementaux et sociaux pour rendre compte de leurs pratiques durables et responsables. Ils peuvent inclure des informations sur les émissions de gaz à effet de serre, la consommation d’énergie, l’utilisation de matières premières, etc. 
  • Sensibilisant de plus en plus leurs clients aux enjeux environnementaux et les incitent à adopter des pratiques durables. Par exemple, elles peuvent encourager les clients à réduire leur consommation d’énergie, à utiliser des véhicules moins polluants, à réduire leur consommation de plastique, etc. 

Pour conclure, les compagnies d’assurance prennent de plus en plus d’initiatives en faveur de l’environnement, l’ACPR accompagne les entreprises et la lutte contre ce marketing trompeur prend de plus en plus d’ampleur, ce qui permet aux consommateurs d’être mieux informés et protégés dans leur choix de produits d’assurance et par la même occasion de lutter contre la dégradation de l’environnement.